Dimanche 28 Juin 2015 – 09h45. Les participants du Solidaritrail sont partis depuis 45min. « Putain merde Jerem, il est 9h45 on a raté le départ de la course ! » Crucifié sur son lit, Jérémie ouvre péniblement les yeux. Il regarde autour de lui, comprend qu’il s’est écroulé tout habillé et chaussures encore aux pieds dans la chambre d’hôtel. Les souvenirs de la soirée commencent à revenir. Ces fameuses 02h30… « Oh non ! On n’a pas fait toute cette route jusqu’en Andorre pour ne pas prendre le départ de la course… On s’en fout, on se met en tenue et on y va ! » Frais comme un camembert Le Rustique resté 5 jours dans un sac à dos, les athlètes de la nuit mettent la machine en route pour rejoindre la ligne de départ et s’envoyer 700m de dénivelé dans le cornet.
Au moment d’arriver sur la zone de départ vierge de tout concurrent, ils croisent Jordi, leur bourreau de la veille qui leur a fait découvrir les joies de la vie nocturne andorrine. En une heure, il a bouclé le Solidaritrail en réussissant la superbe performance de se lever pour le départ. Ne voulant pas passer pour des ivrognes dégonflés, la team Jolie Foulée lui demande dans quel sens part la course. Croyant comprendre ses indications, Kévin et Jérémie se lancent tambour battant à l’assault des 10km en suivant la première route qui part à droite. Grossière erreur. Après un kilomètre parcouru sous un soleil qui leur tape déjà sur le cockpit, ils commencent à s’inquiéter de croiser autant de concurrents courant en sens inverse. Le doute s’installe… Pour en avoir le coeur net, ils demandent à l’agent de circulation s’ils sont bien dans la bonne direction. Le verdict tombe. Il fallait partir à gauche au départ. Aie ! Il leur faut rebrousser chemin pendant un nouveau kilomètre et le maudit chrono continue de tourner. Comme à la plus belle époque de la Carte aux Trésors, ils retrouvent peu à peu la bonne route et rejoignent le vrai parcours de la course grâce aux indications des autochtones qu’ils ont finalement su déchiffrer tant bien que mal.
Le soulagement est de courte durée. Après un kilomètre à suivre les balises du Solidaritrail, les deux coureurs éméchés bifurquent sur le sentier qui grimpe dans la montagne. Une centaine de mètres plus loin, les précieuses balises ont déjà disparues. Ils balisent ! Certains de n’avoir pu se tromper une nouvelle fois de chemin, ils s’entêtent à suivre la piste. « De toutes façons je vois pas où on aurait pu prendre un autre sentier. On n’a pas le choix, on continue, on finira bien par arriver au sommet de la montagne et après, toutes les routes mènent au village. » Cette abnégation (ou bêtise, c’est selon), finira par s’avérer payante. Quatre kilomètres plus loin, et une ascension que l’on qualifiera de laborieuse, les deux génies du trail rattrapent la voiture balai. Prise en flagrant délit en train d’enlever les balises, elle avouera qu’elle les détache au fur et à mesure puisque tout le monde est déjà passé depuis longtemps. Ça fait mal au moral, mais le fait de savoir qu’ils sont sur le bon chemin leur donne un coup de fouet. Les portions plus roulantes arrivent et ils peuvent alors cavaler jusqu’au ravito. Ils dépassent fièrement les mamans avec enfant sur le dos et les invalides qui font le Solidaritrail à leur rythme. Il n’y a pas de petite victoire.
Étonnamment plus en jambes que quand il est dans son état normal, Jérémie lâche les chevaux sur les pistes plus propices à la vitesse de la deuxième partie de course. Il se sent dans son élément dans cette montagne pyrénéenne et casse la ligne d’arrivée en 1h36’16 ». Le chrono officiel indique 3h35′ de course, mais on préférera retenir le temps réel de Nike+. Kévin finit l’aventure 15 minutes plus tard. Dernier valide, mais pas dernier au classement. Le sentiment du devoir accompli. Le pays du tabac et de l’acool détaxés a bien failli avoir raison de la team Jolie Foulée. Mais l’honneur est sauf.