Pour la fin d’année plutôt que de se taper une 3 ème fois le marathon de Berlin, Idris est parti un peu plus à l’est en Corée du sud. On va pas s’éterniser sur sa performance, parti sur des bases de 3H10 il a fait exploser la couscousière pour terminer en 3H36. Ce qui nous intéresse, c’est plutôt son voyage et à quoi ressemble le running là-bas.
Jolie Foulée : Idris, première question : sur une échelle de 0 à J’ai failli rester là-bas et ouvrir ma couscousserie, à quel point la Corée du Sud t’a retourné le cerveau ?
Idris : C’est mon 5ᵉ voyage en Corée du Sud, donc on peut dire que je ne suis pas loin d’ouvrir un concept fusion Kimchi Couscous : un poke bowl au kimchi où je remplace le riz par du couscous. J’ai déjà des noms comme « CouscouSeoul » où « Cheb Namsan » en référence à la montagne Namsan au coeur de Seoul.
Jolie Foulée : C’est quoi le premier choc culturel quand on arrive à Séoul ?
Idris : Mon premier choc, c’était l’immensité de la ville et la place de la voiture dans une ville aussi moderne. Durant mon premier séjour, j’avais une 2 × 5 voies en bas de mon hôtel. Pour eux c’est un simple boulevard, pour nous c’est plus large que le périph à Paris. J’ai aussi été choqué par la proximité avec la montagne : il suffit de faire 30 minutes de métro pour se taper une belle rando en pleine nature.

Jolie Foulée : Au niveau food : quel plat recommandes-tu pour découvrir la gastronomie locale et lequel déconseilles-tu avant une séance ou une course ?
Idris : Un classique Bibimbap, ça existe en plusieurs versions (bœuf, fruits de mer, veggie…) et vous pouvez doser vous-même le piment. Celui de chez Flower rice est vraiment pas mal. Par contre, je vous déconseille de taper un Kimchi jjigae (김치찌개). C’est un ragoût à base de kimchi (chou fermenté au piment). C’est très bon, mais ça peut vous brûler la bouche et le bide… le risque c’est de faire une Diniz le jour du marathon. Sinon, il faut absolument se faire un samgyeopsal (barbecue) et s’enfiler des sam en une bouchée juste après votre course.
Jolie Foulée : Comment tu décrirais l’ambiance course en Corée du Sud ?
Idris : Au-delà de l’ambiance sur le bord de la route, j’ai adoré les moments où les coureurs s’encourageaient entre eux avec des cris comme Kaja ou Jal hal su isseoyo (잘 할 수 있어요). On était tous dans le même bateau à se dire “on va le faire ensemble”. Il y avait un respect mutuel très agréable. En France, le respect s’arrête déjà dans le sas où les gens ne respectent même pas les allures.
Jolie Foulée : T’as croisé des styles running improbables ? Donne-nous la tenue la plus chelou que t’as vu sur la ligne de départ.
Idris : T’as bien un ou deux gars déguisés, mais globalement ce n’était pas le carnaval dans mon sas. Ce qui m’a le plus choqué, c’est le budget running chez les Coréens : c’était très rare de ne pas voir une paire en carbone aux pieds des coureurs. Même dans le sas 1h20 du 10k de Chuncheon, les gars étaient équipés comme des pros.









Jolie Foulée : Niveau orga : on raconte que les marathons coréens sont plus millimétrés qu’une prépa de Nibrun. Tu confirmes ?
Idris : Oui, c’est très militaire. Ça commence à la consigne : ce n’est clairement pas le genre de la maison de perdre un sac.
Il y a suffisamment de toilettes pour éviter que les gens chient dans les buissons ou pissent à côté de ta jambe dans le sas.
Sur le bord de la route, la sécurité veille à ce que les gens ne traversent pas n’importe comment. J’ai même vu un ancien qui faisait la circulation, menaçant avec sa matraque orange, en hurlant sur un passant qui voulait forcer le passage. C’était impressionnant, mais ça permet aux coureurs d’être focus uniquement sur leur course.
Il y a aussi des tentes pour se rafraîchir et se changer après l’arrivée.









Jolie Foulée : Est-ce que les supporters coréens crient plus fort que les supporters français… ou juste plus poliment ?
Idris : Ils sont déjà beaucoup plus nombreux le jour de la course et, oui, ils crient plus fort aussi. Je n’ai jamais vu autant de cheer zones tenues par un nombre incalculable de running crews. Ils donnent beaucoup d’eux-mêmes en hurlant, mais ça manque un peu d’ambiance musicale. Je m’attendais à des mini-concerts de K-pop ou un équivalent de Clean-P qui nous passerait la BO d’un K-drama ou de K-Pop Demon Hunters.
Jolie Foulée : Pendant, ta course, quel a été le moment culturellement bizarre/poétique/incompréhensible qui t’a fait oublier que t’étais en train de souffrir ?
Idris :
On a vite l’impression d’être dans un objectif commun avec les gens sur le bord de la route. Ils ne vous connaissent pas, mais ils vont tenter de vous aider à finir votre course. Ils viennent avec du matos pour assister un maximum de coureurs : gels anti-crampes, Coca, étirements, bombe de froid pour atténuer une douleur… c’est très coréen de faire passer le groupe avant l’individu et de surmonter les épreuves ensemble.
En France, on te tape sur l’épaule et on te dit “allez-allez”.
Jolie Foulée : Les ravitos, est-ce qu’on parle de trucs classiques ou y avait des options inédites/typiques ?
Idris : Tu as toujours le combo classique banane / quart d’orange, mais c’était rare de voir un ravito solide sans Choco Pies. C’est deux biscuits avec une tartine de marshmallow au milieu, le tout enrobé de chocolat.
Je n’ai pas tenté, de peur de devoir demander un mouchoir à une halmeoni (할머니 mamie) comme gouffefrisee sur son premier marathon.
Jolie Foulée : T’as réussi à parler running avec des locaux ? Il y a des trucs qu’ils trouvent bizarre dans notre approche du running européenne ?
Idris :
Globalement, ils ne comprennent pas qu’on se limite à 1 ou 2 marathons par an. Ils sont plutôt du genre à en courir 4 dans l’année et à rajouter 3 ou 4 trails de 100 km en dessert.
Les gars de Commune de Seoul ont enchaîné le marathon de Chuncheon et celui de Seoul avec seulement une semaine d’écart. Ils reprennent même la course le lendemain du marathon comme si de rien n’était.
Je pense aussi que le concept de coupure estivale est incompréhensible pour eux.









Jolie Foulée : Ton meilleur moment post-course ?
Idris : On en revient à la bouffe : je n’ai pas réussi à faire passer la déception du chrono avec la Choco Pie du kit d’arrivée. Il m’a fallu un bon barbecue partagé avec les membres de Commune de Seoul et de GR pour assumer le fait que je sois untalented. On a fait glisser le repas avec du Somaek (soju + bière) . L’ambiance était vraiment cool.









Jolie Foulée : Si quelqu’un hésite à courir un marathon en Corée du Sud, tu lui dis quoi ?
De travailler les mollets et les cuisses, parce que ça grimpe fort en Corée, et surtout de ne pas s’entraîner à manger pimenté en foutant de la harissa dans tous ses plats, au risque de finir bloqué aux chiottes pendant cinq jours sans pouvoir courir durant sa prépa marathon.
















































