Parmi tous les personnages qui constituent cette grande et belle communauté des « runners », il en est un particulièrement attachant. Le bonhomme s’appelle Jean-Pierre, Jean-Pierre RunRun même, et il ballade son teint halé et son léger accent du sud partout où des gens courent. Passionné de course à pied et lui même athlète chevronné, JP a rencontré via son fameux blog video Run Repoter Run le champion Bob Tahri avec qui il a lancé en mars dernier un format de stages au Kenya accessibles aux sportifs amateurs. Après le Kenya, il s’est aussi rendu en Tunisie pour participer aux Foulées du Megara. Jean-Pierre le muzungu nous raconte sa life sur le continent cainfri, merci à lui pour sa disponibilité et ses photos.
Bonjour Jean-Pierre, peux-tu te présenter rapidement pour les rares personnes qui n’ont jamais entendu parler de toi ?
Je pratique la course à pied sous toutes ses formes depuis une trentaine d’années. J’ai vu naître tous les courants (footing, jogging, running). J’ai 47 ans, je suis marié avec deux garçons, dont un qui pratique aussi l’athlétisme en club (Paris Université Club).
Tu reviens d’un stage d’une semaine au Kenya que tu as organisé avec Bob Tarhi, peux-tu nous expliquer comment est né ce projet ?
J’ai une grande admiration pour Bob Tahri. Les hasards de la vie, ou plutôt mes motivations, m’ont emmené à le rencontrer plusieurs fois. De fil en aiguille nous sommes devenus amis. Un soir, nous sommes au restaurant et je lui parle de ce reportage de Canal+ qui le suit au cours de sa préparation à Iten au Kenya. Je lui dit qu’aller là-bas serait mon rêve. Il me répond du tac au tac « Si c’est ton rêve, tu viens avec mois en mars ! ». Facile à dire, j’ai une famille, un travail… Il me dit : « Si c’est ton rêve, tu poses une semaine de congés et je t’emmène… ». Le projet murissant, il me fait part de son désir de partager cela avec d’autres personnes, car je n’étais pas le seul à vouloir partir au Kenya. Ainsi est né l’idée du stage et ce sont 30 runners qui sont partis avec nous.
On sait que tu cours bien (38 mn sur 10K) mais quand même tu as dû en chier face aux kenyans, quel était le niveau de votre groupe ?
A Iten, les choses sont bien structurées, tu ne cours pas comme ça avec un groupe d’athlètes. Chacun de ces groupes appartient à un “training camp”, et nous avions le notre. Le stage était partagé en trois niveaux, avec pour chacun des encadrants français, mais aussi des kenyans que nous avions recrutés pour être “pacers”. Ils se sont donc adaptés au niveau du groupe. Le plus dur fut de s’adapter à l’altitude (2400 m).
« Tu passes plus de temps à glander au soleil qu’à courir au final, c’est pas si dur que ça la vie d’athlète de haut niveau ! »
Peux-tu nous décrire une journée d’entrainement type au Kenya ?
Au Kenya, les journées sont rythmées par le soleil. Le premier entraînement est à 6h30, à jeun. / vidéo « morning run » de JP / Il s’agit d’un simple footing qui a pour rôle d’éliminer les toxines de la séance de la veille et de préparer le corps à la séance du soir. Ensuite, c’est petit déjeuner copieux et douche. Balade ou glande au soleil. A 13h on déjeune, puis sieste. Ensuite glande au soleil. Second rendez-vous de la journée, l’entraînement de 17h : il s’agit d’une séance sur piste, en côte ou d’un fartleck. Comme tu le vois, tu passes plus de temps à glander au soleil qu’à courir au final, c’est pas si dur que ça la vie d’athlète de haut niveau !
Quelles étaient les conditions ? Vous avez bouffé des trucs chelous ?
Nous n’étions pas dans des conditions kenyannes pour l’hébergement, nous étions dans ce qui se fait de mieux à Iten, le Kério View. C’est ici par exemple que vient l’équipe de France de marathon en stage. Durant notre séjour nous partagions nos repas avec l’équipe allemande de marathon. La nourriture était top et très européenne, le patron de l’hôtel est Belge ! Pour avoir des trucs “chelous” il faut aller en ville, et là tu prends peur…
Quel sont ton meilleur et ton pire souvenir sur place ?
Mon meilleur souvenir fut sans conteste le partage avec les kenyans. Nous avons beaucoup échangé avec des coureurs, mais aussi des villageois et surtout les enfants. Ce projet fut au final autant humain que sportif. Je n’ai aucun mauvais souvenir…
« Autrefois aucun muzungu ne venait dans cette ville paumée sur les hauts plateaux. Désormais, tu croises des européens sur l’ensemble des pistes rouges. »
Le Kenya est un pays très pauvre. Penses-tu que la course à pied peut constituer un levier de croissance pour l’ensemble de son peuple et pas seulement pour les meilleures athlètes du pays ?
La course à pied est au kenya l’un des meilleurs ascenseurs sociaux. Il permet à des milliers de personnes, sans diplôme ni qualification, de gagner en une course l’équivalent d’un an de salaire voir beaucoup plus. Selon les dires de Bob, la ville d’Iten a déjà bien changée ces 10 dernières années. Autrefois aucun « muzungu » (blanc) ne venait dans cette ville paumée sur les hauts plateaux. Désormais, tu croises des européens sur l’ensemble des pistes rouges.
Est-ce que certains d’entre vous ont testé les boites de nuit africaines (on dira rien à coach Bob) ?
Cela se voit que tu ne connais pas Iten, il n’y a rien ! Pas de restaurant, ni de discothèque, les gens sont trop pauvres pour cela. Par contre tu as une multitude de cafés qui te proposent de boire ou manger comme ça sur le pouce. Je peux te dire aussi un truc, avec les deux entrainements par jour, nous étions tous claqués et couchés à 22h.
Quand est-ce que tu retournes sur les hauts plateaux ? Comment fait-on pour partir avec toi ?
Compte tenu du succès de ce premier stage et de la frustration de ceux qui n’ont pas pu partir avec nous, nous mettons de nouvelles possibilités de partir avec Bob dès la rentrée. Les prochaines dates seront probablement sur octobre et novembre mais pour plus de renseignements et les tarifs on peut m’écrire à stagetahri@gmail.com / itw Bob Tahri sur le stage par JP /
Après le Kenya tu es allé à Tunis pour participer aux Foulées du Megara. Peux-tu nous dire deux mots sur cette course ?
Effectivement, trois jours après mon retour en France je suis reparti sur le continent africain, à Tunis. Le départ a été programmé le lendemain du tragique attentat au musée du Bardo. J’avoue avoir un peu hésité à partir, mais au final, il était important de ne pas être terrorisé et de prouver notre soutien au peuple Tunisien.
On imagine que tu as dû faire de belles rencontres…
Nombreux sont ceux qui sont venus nous remercier d’être là malgré la terreur. Nous avons beaucoup échangé avec la population et surtout les coureurs. J’ai accueilli à mon tour sur le marathon de Paris un groupe de Tunisiens rencontrés sur place. Très émouvant…
D’autres projets de voyages dans les semaines ou mois à venir ?
Des envies, j’en ai plein, des projets aussi. Mais ma priorité reste ma famille. Je peux déjà t’annoncer dans les trucs “exotiques” que je serai au marathon de Berlin en septembre et à nouveau à Iten en octobre ou novembre. Et pourquoi pas retourner à New York !
On termine avec notre question classique, comment tu définis une jolie foulée ?
J’ai quasiment toujours été en club d’athlétisme, alors le travail de pied je connais. Les kenyans par exemple ont un pied de dingue, naturellement. Je possède une foulée médio pied qui est encore perfectible. Mais plus important que la jolie foulée, c’est d’être une jolie personne !