C’est l’histoire de 2 bonhommes qui pensaient simplement s’entrainer 2 mois, courir le marathon de Paris et rentrer chez eux avec un nouveau record perso. C’est exactement ce qui c’est passé mais le chemin pour y arriver fût semé d’embûches et de triche.
Tout commence fin janvier 2022 par la création d’un groupe WhatsApp nommé « ICI C’EST SUBTHREE »(avec un nom pareil toute l’équipe était vouée à être éliminée au quart du projet) et l’envoi d’un lien pour accéder au fameux plan d’entrainement du Coach Nibrun. Ce devait être le début d’une prépa de 10 semaines avec 5 sorties hebdomadaires quand la loi de Murphy s’invita à l’entrainement.
1) Les emmerdes
Après seulement 14 jours de bons et loyaux services, Pierre doit déjà mettre le plan d’entrainement sur pause car son TFL s’est réveillée. Pour combler 10 jours de retard, PC7 part en stage d’entrainement au Kenya avec Distance. Et pendant que Pierre fait le plein de globules rouges au pays des Massaïs, c’est au tour de Thibaud de faire une mauvaise rencontre. « Une tendinite du releveur. C’est pas banal ça ! Vous êtes la curiosité du jour » lui dit le médecin du sport. Normalement réservée aux ultra-traileurs, cette Ténosynovite lui tombe dessus après une pauvre sortie longue un peu vallonnée. Elle ne le lâchera plus pendant 4 semaines. Thibaud regonfle les pneus de son Canyon et tente tant bien que mal de garder un semblant de « caisse » grâce au vélo. Pierre, lui, rentre au pays tout bronzé et galvanisé par sa rencontre avec Brother Colm O’Connell. Il ne visera finalement pas 3h15 le dimanche 3 avril à Paris mais bien 2h59min59s. « Y a 1% de chance que ça passe mais si ça passe, c’est le casse du siècle !« .
Début mars, les deux compères sont enfin à nouveau réunis dans le couloir numéro 1 de Ladoumègue. Mais Pierre semble en galère, il se plaint de fatigue. Il met tout ça sur le compte de Brother O’Nibrun et de son « putain de plan« . Il lui faudra contaminer sa meuf pour comprendre qu’il s’entrainait depuis plus d’une semaine avec le Covid.
Le doute se fait alors une place bien confortable dans la tête de nos 2 protagonistes. Ils accumulent autant de bornes sur Strava que d’incertitudes. Peut-on vraiment passer sous les 3 heures en loupant plusieurs semaines de prépa ? En ayant été contaminer par le variant Omicron ? En trainant une blessure qui peut se réveiller pendant la course ?
2) L’espoir
Quand tout va mal il faut savoir trouver des petites pensées positives auxquelles se raccrocher pour continuer à se battre et ne pas perdre la foie. C’est pourquoi, à moins d’un mois du départ, Pierre et Thibaud décident de se doper !
Ils font appel aux services de Jean Pourrat alias docteur Logan (le docteur Ferrari du pauvre) qui leur concocte un programme de 3 semaines de Spiruline et de Shaker « Recovery » de chez Décath’. En complément, le coach Nibrun leur recommande vivement le dopage mécanique et 3 jours de régime dissocié scandinave. Bonjour les Nike AlphaFly et à dieu la bouffe italienne. Et pour donner encore un peu plus de confiture aux cochons, Jolie Foulée monte une équipe de 6 pacers qui se relayera pour accompagner nos deux dopés tout au long de la course. Même Eliud ne pourrait rêver une organisation plus pipée pour battre un record.
Mais encore une fois dans ce projet, le Karma vient rééquilibrer un peu la balance. Une vague de froid s’abat sur tout le pays pile la semaine de la course. La météo agricole annonce 1°C au départ de ce Marathon printanier.
3) La course
Dimanche 3 avril 2022, alors que le reste des franciliens rentrent de soirée en titubant, deux réveils retentissent dans le 11ème arrondissement. Il est 5h20, les tartines grillent, le café coule, la tenue de course est soigneusement posée sur le canapé, l’excitation monte. Ce dimanche à Paris, c’est jour de marathon.
2h30 plus tard, Pierre et Thibaud observent nonchalamment par la fenêtre de la Nike House Of Innovations les honnêtes gens transis de froid et se disent qu’il serait peut-être temps d’aller rejoindre leur sas in extremist. Ils partent dans la toute dernière vague du sas rouge accompagné de Kévin en guise de Sherpa. Sa mission : porter les 10 gels Maurten et récupérer gants et bonnets une fois les organismes réchauffés.
KM 5 : L’euphorie du départ est redescendue. Dans le groupeto, on jacte pour détendre l’atmosphère et on cherche à placer chacune de ses foulées sur la ligne verte du tracé officiel comme des funambules. Tous les pièges de la rue de Rivoli – pavés, nies de poules, terre-pleins, plots – sont évités de justesse.
KM 10 : Lionel, Guillaume et Xav prennent la relève de Kévin. Avec leurs cuissards Aeroswift et lunettes Oakley, on dirait la patrouille de France qui escorte 2 pigeons Parisiens.
Le plan est d’arriver au semi-marathon avec quelques dizaines de secondes d’avance pour compenser avec la fin du parcours qui est bien vallonnée. Alors au moindre faux plat descendant on allonge la foulée pour gratter quelques miettes, « c’est toujours ça de pris« .
KM 15 : L’horrible bruit des plaques carbones sur l’asphalte vient rompre le calme du bois de Vincennes. Les pacers battent la cadence à 4’15/km comme des métronomes. Ils sont hélas aussi obligés de faire la Police car les pseudo-athlètes du jour sont indisciplinés : « les gars arrêtés de parler vous allez avoir des points de côtés », « restez bien sur la ligne verte », « on s’occupe de l’allure, contentez vous de courir ».
KM 21,1 : 1h29’11 au semi. Nickel.
KM 23 : Jean et Flo montent dans le train Sub3. Pierre à déjà l’impression d’être au 30ème kilomètre. Il décide de laisser Thibaud se faire pacer par les deux arrivants qui semblent avoir plus envie de se faire plaisir que de faire les horlogers Suisses.
KM 30 : C’est là que commence véritablement le Marathon. Pierre et Thibaud font les divas et refusent désormais le moindre effort superflu. Ils exigent que leur gels leur soient tendus déjà ouverts et qu’on leur porte leur bouteilles entre chaque gorgée d’eau. Ils n’ont pas pris le mur mais ils ont pris le melon.
KM 34 : C’est là que se trouve le plus gros piège du parcours. 500m de montée qu’on souhaiterait pas à son pire ennemie. Il n’y a que deux façons de gravir ce coup de cul : marcher ou tirer la grimace et insulter à voix haute cette « sale pute » de bosse.
KM 36 : Les membres de Jolie Foulée qui ne courent pas sont postés là. Thibaud et Pierre sont accueillis par un feu d’artifice : confettis, fumigènes, encouragements et haleines qui sentent bon la bière en cannette. Cheers, la cheer zone !
KM37 : Thibaud a définitivement perdu le fil du chrono, il ne sait pas s’il est dans les temps pour faire moins de 3h00 ou carrément en avance. Jean lui ment et lui dit « on est tout juste bien pour le Sub3, reste concentré ». Pierre à l’impression qu’il court avec un vent de face.
KM 38 : Jean et Flo annoncent à Thibaud qu’ils le laisseront au 40ème mais la diva refuse. « Vous restez avec moi jusqu’au 41ème les gars !« . Pierre doit accepter que le casse du siècle n’aura pas lieu mais que l’objectif de 3h02 est encore à portée de main. Pour trouver du courage, il repense aux enfants d’Item qui se moquaient de lui en le regardant s’entrainer sur la terre des champions.
KM 41 : Thibaud se retrouve seul pour la première fois de la course. Il regarde sa montre « 2h53’40 ». Le peu d’esprit mathématique qu’il lui reste lui dit d’accélérer et de tout donner, qu’un Sub2h58 est possible. Lionel, sans dossard, se cache derrière Pierre et arrive à passer entre les mailles du filet de la sécu. Pierre trouve la force de changer d’allure pour finir fort.
KM 42,195 : Est-ce qu’un marathon se résume vraiment à un simple chrono ? Oui ! 2h57min38 pour Thibaud et 3h02min47 pour Pierre. Presque Sub3 de moyenne à eux deux, le contrat est largement respecté.
4) Les leçons tirées
- Il vaut mieux être sous-entrainé que sur-entrainé
- En vrai 1°C au départ c’est pas un problème
- Se faire pacer c’est vraiment de la triche
- Le dopage ce n’est pas réservé qu’à l’élite
- Pierre ne va pas pouvoir prendre sa retraite de la course à pied et va devoir recourir un marathon
- Se blesser ça fait parti des plans d’entrainement du coach Nibrun et c’est de bon augure