De mieux en mieux placé sur les grosses courses de l’hexagone et d’ailleurs, Martin Kern est de ceux sur lesquels il est bon de garder un oeil pour les prochaines années. Arc’teryx l’a bien pigé et a signé le bougre l’été dernier pour qu’il promène les derniers équipements de la marque dans les pelotons de tête. Assigné à présence le week-end dernier pour la première édition de l’Arc’teryx Academy à Paris, Martin s’est plié au jeu des chemins pavés et Buttes locales, en se laissant guider par les protagonistes de la branche trail de Jolie Foulée, Romain et Guillaume.
Martin, on t’a découvert en 2019 après une pleine saison et de beaux résultats. Ça t’a ouvert l’appétit pour 2020 ?
Clairement, oui, une super année 2019 à jouer avec les meilleurs et surtout à se faire plaisir sur les chemins. J’avais vraiment la forme et ça m’a ouvert de nouveaux projets, comme le partenariat avec Arc’teryx. Je suis aussi de plus en plus intégré à la communauté, avant en Océanie, maintenant en France, même si je reste le nouveau, l’outsider qui confirme.
Avant ça, t’étais plutôt discret. En fait, t’es arrivé parmi les élites assez soudainement (après 3 ans d’expatriation en Nouvelle Zélande). C’est parce que t’en avais marre de ton taff ?
Ah non, clairement pas ! J’étais responsable dans une usine donc un taff hyper prenant. Du coup, j’avais besoin d’évacuer une certaine frustration et j’avais la volonté de me retrouver dans la nature et avec les énergies qu’elle peut transmettre. Ça me permet d’avoir un bon équilibre de vie. Mais j’aimerais bien me faire chier au taff !
Comment se présente 2020 ?
L’objectif c’est des courses plutôt locales. Je vais rester à la maison, autour de Belledonne, à Grenoble. Dans l’ordre le 76k du Ventoux, le 119k de la Maxi-Race, le 51k du Swiss Canyon Trail, le One&1 en duo avec ma chérie, un projet de film aux US avec Arc’teryx, la PicaPica (109k et 11 500D+), et je terminerais à la Réunion avec le Grand Raid. Gros projets.
Une course aux US, un jour ?
Oui clairement, la Hardrock ! Pourquoi pas la Western aussi, même si c’est assez roulant et je préfère les profils en altitude avec du dénivelé.
Tu te considères comme un outsider sur le circuit ?
Oui, je suis toujours outsider selon moi. Je me régale à courir avec les élites mais faut confirmer. Aujourd’hui j’ai sorti des belles perfs mais je ne fais pas partie du top 10 mondial.
C’est qui tes idoles de la discipline ?
Parmi les gens que je suis avec passion, il y a forcément François D’Haene, Kilian Jornet. C’est deux coureurs très différents mais que j’apprécie énormément. En course à pied, y a des extraterrestres. Je suis subjugué par les perfs de Jim Walmsley, de Tim Tollefson, c’est des mecs qui forgent le respect. Après je regarde aussi beaucoup les skieurs-alpinistes, les cyclistes, ce qui se fait dans le speed-riding. Je suis plus montagne on va dire. Je suis plus en admiration avec les mecs en contact avec la montagne.
Tu évoques souvent la notion de multisport. Est-ce que tu souhaites garder cette pratique croisée ou tu as quand même envie d’aller jusqu’au bout du délire trail en terme de perf ?
Oui forcément c’est quelque chose qui m’intéresse de voir jusqu’où on est capable d’aller. Après personnellement aujourd’hui, je ne me sens pas capable de gagner un UTMB®. Quand je vois que l’année dernière je me suis préparé fort pour cette course (il termine 12e), il y a encore une énorme différence avec ceux de devant. Moi je prends mon pied à varier les activités entre ski, vélo, speed-riding, surf et course à pied. Et clairement, c’est ça qui me plait donc là je suis plutôt à profiter de ce que je suis entrain de faire. La perf, elle, viendra dans le plaisir.
Et sur la route ? Tu t’es notamment essayé à la piste plus jeune (52″ au 400m). Quand et comment tu as fait la bascule sur des courses avec 10 000D+ ?
J’ai commencé l’athlé à l’âge de 7 ans et jusqu’à mes 18. J’ai fait pas mal de cross puis j’ai basculé sur du décathlon et du 400m. Après je n’ai jamais été bon, niveau régional au mieux. Ensuite en continuant mes études j’ai stoppé la course à pied, je faisais que du vélo et du rugby où j’ai pris 20 kilos pour frôler les 100 kg. C’est plus tard que j’ai découvert le trail, grâce à un groupe de potes de Toulouse qui s’entraînait dans les Pyrénées.
Plus le temps passe, plus la branche trail de Jolie Foulée se développe. Tu crois que c’est un sport de vieux, le trail ?
C’était ! Mais avec la popularité croissante et les ambiances sur les courses, je crois que les jeunes arrivent. Et c’est ça qui est cool, tout le monde se mélange, c’est vraiment sympa que les expériences se partagent, surtout autour d’une bière. Faut pousser pour que cette branche trail Jolie Foulée se développe !
Pourtant les élites du trail sont plus jeunes que les stars du marathon…
Oui effectivement. Je pense que c’est surtout une question d’expérience. Je pense qu’on va encore entendre parler longtemps de Kilian Jornet par exemple. Et tu vois c’est intéressant parce qu’il a dit récemment qu’il voulait s’essayer sur une course à plat, potentiellement un marathon. Il arrive à un moment où il a certainement envie de se tester. Moi perso, je ne me sens pas prêt pour un marathon, un semi ou même un 10k. Même si ça me ferait du bien.
Sur route, c’est un peu le royaume de qui à la plus grosse. Ça se regarde aussi dans le trail ?
Clairement. Ça se regarde au départ, ça joue le bluff, ça montre les cuisses bien épilées. Mais ça reste un milieux très bon enfant, y a beaucoup de respect, de fraternité. En trail si on peut finir à deux, on finit à deux.
Tu as suivi tout ce qui se passe autour des chaussures avec plaques en fibres de carbone. Est-ce que tu penses que cette technologie peut prochainement se glisser dans les chaussures de trail ?
Ça serait cool ! Ça dynamiterait un peu le peloton. Plus sérieusement, je crois que c’est surtout beaucoup de communication. Si quelqu’un veut faire le buzz dans le trail, il y a qu’à faire pareil.
Si Arc’teryx te propose un tel proto, tu testerais ?
Oui je testerais, clairement. C’est intéressant de tester des nouveaux concepts. Il y a eu d’autres essais comme Cimalp, avec une chaussure à drop progressif. Il y a des nouvelles idées comme ça, super intéressantes, donc la chaussure carbone, pourquoi pas. Toute la technologie, faut l’utiliser. Mais pour le trail, ça aurait peut-être moins d’impact parce que les appuis sont différents, moins rythmés que sur la course sur route.
Après il y a d’autres technologies, par exemple pour retransmettre les courses en live. Ça permettrait d’avoir un suivi télé ou médiatique plus important. Ça permettrait de professionnaliser plus la discipline.
Avec ou sans carbone, c’est quoi une jolie foulée pour toi ?
Une jolie foulée ? Elle va être courte, médio-pied, aérienne… Kilian quoi !