On ne ressort jamais indemne d’une SaintéLyon. L’histoire qu’on va vous raconter maintenant est encore plus rocambolesque qu’une série Netflix ou qu’un épisode de Serge le Mytho. Tout ce qui va être expliqué ci-dessous est absolument vrai. Vous allez vous dire que ce n’est pas possible, comment est-ce possible il d’en arriver là ? Et pourtant tout est réel. On a même demandé aux différents protagonistes de l’affaire de témoigner pour confirmer les faits.
Accrochez-vous, et bon épisode SaintéStress :
Dimanche 1er décembre 02:47 : Nico vient de franchir la ligne d’arrivée. Il est fatigué mais content, il a couru aussi vite qu’il voulait. Il s’assoit sur le sol. Il décide d’enlever son gilet de trail pour sortir son téléphone portable pour appeler ses copains (Jean, Kévin ou Vincent) pour savoir s’ils sont déjà à la Halle Tony Garnier. Mais le téléphone n’est plus là. La chaussette BV Sport où se trouvait le téléphone (pour garder la batterie au chaud) et la frontale de rechange ne sont plus là. C’est le début des emmerdes.
03:20 : Après une bonne douche, il est temps de se mettre à la recherche du téléphone. Mais comment faire ? La Halle Tony Garnier est gigantesque, impossible de retrouver qui que ce soit. C’est la merde.
Florent, un chronométreur Livetrail, voit notre untalented runner errer devant les écrans officiels où Nico constate que Kevin a bien abandonné au 11e kilomètre, et Vincent au 24e. » Est-ce que tu peux m’aider à retrouver mon téléphone ? Est-ce que je peux avoir un ordinateur pour localiser mon téléphone ? »
Ahuri, Florent s’exécute et Nico le suit jusqu’au bord de la ligne d’arrivée où l’investigation continue.
03:33 : Après une débile recherche sur Google où Nico lit 3 fois un article sans comprendre comment faire, Florent prend les devants et télécharge l’application sur son propre téléphone qui permet de localiser le téléphone de Nico. Information importante : le téléphone ne bouge pas, il est aux alentours du ravitaillement du Camp-Saint Genou au km 11 de la course (seul moment de la course où Nico, en enlevant sa casquette, a dû malencontreusement faire sauter son téléphone du sac en tirant sur le câble de sa frontale, très con…). Nico fait sonner son téléphone, tente de joindre quelqu’un qui pourrait décrocher, envoie des messages de menace « Décrochez, je suis coureur, vous avez mon téléphone » (sans savoir si quelqu’un l’a en sa possession ou si il se trouve au bord du chemin. Encore très con).
03:40 : Première mauvaise décision : Nico veut aller immédiatement récupérer son téléphone. Il a peur que quelqu’un le trouve et le dérobe, il en a besoin avant 14:00, heure de départ de son train. Il contacte Jean, via la téléphonie Instagram du compte de Florent (oui, personne ne connait le numéro de ses potes). Et Jean lâche un petit « Mais mec, je dors déjà, j’ai pas pu venir à la Halle… » Première désillusion, Nico ne pourra pas bénéficier du véhicule de Jean. Il doit alors retrouver ses 2 autres potes, pour récupérer un téléphone et commander un Uber pour aller récupérer comme un grand garçon son téléphone au ravito de Saint-Genou. Sur le papier ça parait simple, mais en fait non.
03:52 : téléphone de Vincent dans la main, mobile déverrouillé sans mot de passe ni empreinte digitale, Nico se dirige devant la Halle Tony Garnier. Son téléphone borne toujours à Saint Genou, c’est une question de minutes pour que les retrouvailles aient lieu. Déjà 8 minutes que tous les Uber environnants refusent la course. Quelle idée d’aller à Saint-Genou à 4h du matin, à plus de 30 bornes d’ici ? Nico décide donc de monter dans un taxi qui stationne avec ses warnings allumés devant la Halle. « Bonjour, je dois aller à Saint-Genou pour récupérer mon téléphone ? Ok c’est bon pour vous ? » Furkan, le chauffeur acquiesce et demande un peu de précisions sur les raisons de ce monde devant la Halle, il ne connait rien à la course à pied.
04:03 : Au moment de tenter de déverrouiller le téléphone de Vincent, première grosse emmerde : le téléphone demande un code ou l’empreinte de Vincent. Impossible de savoir si le téléphone de Nico borne toujours, impossible d’écrire à Kévin pour demander le code de déverrouillage. Le sort s’acharne.
1 minute plus tard, le téléphone de Vincent sonne « Bonjour, c’est le chauffeur Uber, vous êtes où ? » » Je suis dans un taxi. » » Vous vous foutez de ma gueule ? Je refuse des clients depuis toute à l’heure, annulez la course au moins » « Je ne peux pas, j’ai pas le code du téléphone » » Arrêtez c’est pas mon problème ». Putain, Nico le roi des cons. Et Furkan qui commence à se dire « Mais vous êtes entrain de me la faire à l’envers ? Vous allez me payer comment ? » Ne vous inquiétez pas, on va le retrouver, et je vous paie avec mon téléphone. Est-ce que je peux avoir le votre pour savoir si le mien borne toujours à la destination ? Est-ce que je peux utiliser votre compte Instagram pour envoyer des messages à mes potes pour récupérer le code du téléphone ? » Nico est complétement en roues libres.
04:24 : Le téléphone de Nico est entrain de se déplacer, c’est la merde. Il avance vite, on a l’impression qu’il est dans une voiture. Nico et Furkan insistent en appelant mais personne ne répond. Direction le point de ravitaillement de Soucieu en Jarrest. Le téléphone borne depuis 3 mn là-bas et n’a pas l’air de bouger. C’est soit un coureur dans la navette abandon, soit une famille de coureur qui suit la course, soit un bénévole, soit un petit malin qui veut me piquer mon téléphone (pas du tout, mais le manque de lucidité commence à être important). « Furkan, on va à Soucieu, direction le ravito » « Mais c’est quoi le ravito, c’est un bar ? C’est un appartement ? » Bordel, Furkan il comprend rien, mais on lui en veut pas c’est normal.
Nico tape un sprint pour demander à tous les bénévoles de Soucieu si quelqu’un a ramené un téléphone car il bornait sur la zone il y a moins de 10 minutes. Personne n’est au courant, ni le responsable des objets trouvés, ni Maryline qui prête gentiment son téléphone pour que Nico puisse télécharger l’application pour localiser le sien (bah oui, Furkan a gardé son téléphone dans le taxi, Furkan n’est pas complétement demeuré. Bientôt Nico va lui demander les clefs de la bagnole à ce rythme). Et là, nouveau rebondissement, le trou se creuse encore, le téléphone prend la direction du ravitaillement de Chaponost.
Dimanche 38 décembre 39:45 : Nico n’en peut plus, le téléphone avance plus vite que nous, le chauffeur et le coureur arrivent trop tard à Chaponost. Le téléphone prend l’autoroute, personne ne répond. Le compteur du taxi tourne, Furkan va se mettre bien, Nico est entrain de perdre tout espoir. Kévin rappelle Furkan « Oui, le code c’est ça ». Super merci, ça fait plaisir mais c’est un peu tard les cocos.
Le téléphone revient à la Halle Tony Garnier et n’a plus l’air de bouger : Nico est persuadé que c’est un coureur qui l’a dans son sac, qu’il vient récupérer son sac à la consigne et qui va ensuite rentrer chez lui tranquillement avec la chaussette BV Sport de Nico.
Le temps presse, il faut essayer de le récupérer rapidement avant que le téléphone n’arrête de borner. Nico demande à Furkan d’arrêter la course, la note est salée 177€ mais aucun moyen de paiement si ce n’est le sans-contact du téléphone de Vincent. Pas le code PIN (Vincent dort déjà finalement, donc impossible de payer), Nico fait 2 paiements sans contact de 50€ mais le 3e ne passe plus.
« On va rester dans une relation 100% de confiance, je vous attends » lâche un Furkan patient et crédule.
05:30 : Après avoir demandé à tous les bénévoles de la Halle qui se trouvaient dans la zone du téléphone, un gentil monsieur montra la zone des objets trouvés de la Saintélyon : une pauvre palette aussi chargée que la caverne d’Alibaba. Tout ce que tu veux, mais pas de téléphone de Nico. MAIS BORDEL IL EST DANS LA ZONE LE PORTABLE, IL EST OU ?
Nico commence à perdre pied, il n’arrive plus à réfléchir (je crois qu’il n’a jamais réussi à réfléchir depuis le début de l’histoire).
Mais ce gentil bénévole « Attendez, on a une zone bénévoles, fermée à clef, il est peut-être là, on l’a peut-être ramené ».
Et derrière cet algeco, au fond de la Halle, Nico fait sonner son téléphone et l’entends. C’est la délivrance, les larmes coulent, il a gagné à l’eurotéléphone. Il patiente afin que la responsable vienne ouvrir cette porte, embrasse tout le monde, et part en sprint vers le taxi de Furkan pour célébrer cela ensemble.
« Vous savez quoi Furkan, on va se mettre bien, vous allez me ramener en taxi jusqu’à l’hôtel »
06:00. L’ambiance est plus détendue dans le taxi, l’histoire est incroyable, on va pouvoir la raconter. Nico demande si Furkan est gagnant dans l’histoire « Franchement 200€, pour 2 heures de temps, oui vous m’avez mis bien en vrai ».
Nico salue Furkan, appelle Kévin et lui dit qu’il arrive dans la chambre. « T’as retrouvé ton téléphone alors ? » « Oui, je t’expliquerai ».
Quelques enseignements de cette SaintéStress :
Quand on est à la SaintéLyon, on devient de vrais prédateurs, on est très concentrés, la nuit, la météo, le contexte fait qu’on est encore plus vigilant, encore plus concentrés, encore plus focus. Nico n’a absolument pas pris de recul sur ce qui lui arrivait et dans la précipitation n’a fait que des mauvais choix.
Le manque de lucidité de Nico pendant cette histoire est évident.
Nico a fait du Taxi pendant 2 heures pour revenir au point de départ. Il a rencontré un chauffeur de Taxi aussi méfiant que gentil.
Ce genre d’histoire ne pourra arriver qu’à la SaintéLyon et Nico peut vous assurer qu’il retournera à la SaintéLyon l’année prochaine. Il se passera autre chose et ça fera toujours une belle histoire.
Voici quelques témoignages :
Florent – Livetrail :
« Je vois un Nico, paniqué, qui a perdu son téléphone. On arrive à localiser son téléphone mais on a mis tellement de temps à comprendre qu’on pouvait appeler son téléphone, seul numéro qu’on connaissait finalement. Quand le téléphone commence à bouger, c’est la panique totale, le mec ne répond pas. Je crois qu’il a réussit à retrouver ses potes mais quelle histoire ! Il était vraiment dans un état second. »
Furkan – Taxi :
Pourquoi tu étais devant la Halle Tony Garnier à cette heure-là ?
J’ai appris l’existence de la Saintélyon le jour même par un collègue Taxi. Je venais d’arriver sur la zone et j’avais décidé de stationner un moment pour voir si quelqu’un avait besoin d’un taxi. C’était le milieu de la nuit, il y avait du monde qui traînait autour de la Halle, mais je ne savais pas du tout ce qu’il se passait. Je me suis dit : « Pourquoi pas attendre ici, ça sent les clients fatigués. »
Est-ce que tu connaissais la Saintélyon, la course organisée ?
Pas du tout. J’avais déjà entendu parler de courses comme le marathon de Lyon, mais la SaintéLyon, jamais. En voyant autant de gens avec des vêtements de sport et des médailles autour du cou, j’ai vite compris que c’était un gros truc. Mais honnêtement, courir de nuit dans le froid ? Ils sont fous, ces gens-là.
Comment tu as senti Nico quand il est arrivé dans le taxi ?
Ah, Nico… Il était plus au moins stressé, paniqué, mais pas méchant. Dès qu’il est monté, il m’a expliqué qu’il avait perdu son téléphone quelque part sur le parcours. Il parlait vite, il transpirait encore, et il avait l’air un peu pressé. Au début, je me suis dit qu’il avait peut-être trop forcé sur l’effort ou qu’il s’était cogné la tête en courant (rires). Mais il était surtout stressé, comme si son téléphone contenait sa vie entière.
Est-ce que tu as cru à toute son histoire ?
Honnêtement oui je l’ai cru mais avec un petit peu de méfiance quand même. Il me disait qu’il suivait son téléphone sur une application, qu’il envoyait des messages avec des menaces, qu’il allait à Saint-Genou pour le récupérer… C’était tellement rocambolesque que j’avais du mal à y croire. Mais il avait l’air tellement sincère, et il insistait tellement pour qu’on parte tout de suite, que j’ai suivi le mouvement. Je me suis dit : « Soit c’est un gars qui dit vrai, soit il est en plein délire. »
Est-ce que à un moment tu pensais que c’était faux ?
Quand il a commencé à me demander d’utiliser mon téléphone pour envoyer des messages sur Instagram ou qu’il m’a demandé si je pouvais « localiser son portable », j’ai eu un gros doute. Je me suis demandé si ce n’était pas un coup monté ou une arnaque. Mais il était tellement nerveux et désespéré qu’il n’avait pas l’air de quelqu’un qui jouait un rôle. Quand il a juré sur la tête de sa fille, je me suis dit qu’il voulait vraiment récupérer son foutu téléphone. Il m’a demandé si je connaissais la définition d’un ravito, j’ai même commencé à me marrer. Là, j’ai compris que c’était vraiment une histoire incroyable.
J’étais méfiant mais franchement je le croyais, car je l’ai laissé partir 15/20 minutes du taxi sans savoir si il allait revenir !
Est-ce que tu as gagné ta soirée avec cette expérience ?
Oh que oui ! C’est ma soirée la plus rentable depuis que je suis taxi. Grâce à cette fameuse course à faire le tour de Lyon et du Rhône ! C’est pas tous les jours qu’on vit une aventure pareille. Bon, pour être honnête, la course m’a coûté de l’essence et un peu de patience, mais la note était très correcte. Mais au-delà de l’argent, c’est surtout l’histoire que je vais retenir. J’ai gagné une anecdote à raconter à tous mes clients et mes amis : « Vous savez, un jour, j’ai aidé un coureur complètement fou à récupérer son téléphone en pleine nuit sur une course de dingues. »