A l’heure où la France entière se demande qu’est-ce qui est jaune et qui attend, Forrest est parti dans les Pyrénées pour essayer de trouver la réponse à » Qu’est-ce qui commence par T et te flingue les jambes ? »

Si pour beaucoup d’entre vous les Pyrénées sont synonymes de fromage de brebis, pâtés de canard et sosies en tout genre de Jean Lassalle, pour d’autres la belle chaîne montagneuse peut très vite se transformer en chemin de croix… et Dieu sait que c’est long.

Alors Forrest, c’est quoi la Course des Refuges ?

Des descentes et surtout des montées, enfin je me souviens plus vraiment de l’ordre. En gros c’est un trail assez connu dans les Pyrénées qui forme une boucle au départ de Cauterets et qui, comme son nom l’indique, passe par plusieurs refuges à des altitudes plus ou moins hautes. 53 Km pour la version longue, 6 cols et 3457 mètres de dénivelé … une balade dominicale tranquille quoi.

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Deuxième fois que tu te présentes sur un trail dans ta jeune vie de coureur, ça fait quoi la haute montagne ?

Ca fait mal. Je pensais être prêt pourtant mais ça ne laisse pas de place à l’improvisation. Il faut s’entraîner sérieusement, disons convenablement si tu veux avoir la moindre ambition. Vu mon “régime” je me suis dit qu’au moins j’allais pouvoir admirer la vue, mais même pas ! Dès que tu ne regardes pas tes pieds ou 5 mètres devant toi, tu te ramasses ou termines dans le fossé.

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Bon mais concrètement cette course elle s’est passée comment ?

Je voulais essayer de faire un truc, me tester face aux gars du coin et connaître quel chemin il reste à parcourir sur de telles distances si tu veux prétendre à quelque chose. Visiblement j’aurais mieux fait de rester tranquillou dans les rangs.

Déjà le départ est à 6h, c’est tôt 6h, je me suis pointé sur la ligne à 3 minutes du coup de sifflet.

Ensuite, élément fort regrettable, les 1300 mètres de D+ des 13 premiers kilomètres qui ont eu raison de moi, enfin de mes jambes. Après 3 km elles me demandaient déjà d’arrêter, j’ai vite compris que ça allait être long, très long.

Je te passe les états psychologiques par lesquels je suis passé mais en gros j’ai tout donné sur les premiers 15k, à tel point que je me retrouve pointé dans les 20 premiers au premier ravito. (J’ai pas vraiment l’habitude)

J’ai par la suite découvert des éléments annexes qui m’ont vite fait reculer dans la hiérarchie.

Éléments annexes, tu peux préciser ?

Je veux parler de la descente, cette chose fourbe… Dès la première je me suis senti pousser des ailes sauf que non. Première descente = première chute. J’y suis donc allé molo sur le reste de la course, sûrement trop d’ailleurs. En y réfléchissant bien, je suis un peu le Peter Sagan du trail, je force comme un âne dans les côtes et je ne sais pas descendre. De fait, tout le monde me dépasse, je les envie car ils arriveront encore plus vite chez eux.

Les ravitos, rassure moi tu étais présent ?

Là c’est un OUI. Y’a pas à dire en montagne on sait recevoir : fromage, pain, saucisses, c’était le rêve. Je peux te dire que les bénévoles sont couillus car les ravitos sont au beau milieu de nulle part et uniquement accessibles à pied, à cheval ou à dos d’isards à la limite.

Bref, les gars restent là toute la journée sous la pluie à te réconforter et te motiver alors que les conditions sont pourries.

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Des conditions pourries, je n’étais pas au courant ?

Je l’ai pas précisé ? Des conditions hyper sympas oui, de la pluie, de la neige, et des rafales de vent à plus de 100 km/h dans les cols et sur les sommets. Un régal. Surtout que j’étais dans mon quasi plus simple appareil, mini short, débardeur et coupe-vent. Autant te dire que ça plus mon niveau technique proche de zéro, ça ne m’a pas aidé. On n’y voyait pas à 20m par moment. Je passais sur des névés (amas de neige éternelle) où si tu glissais, tu terminais 500 mètres plus bas dans un lac ou sur des pierres.

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Ok la montagne quoi … t’as pu finir la course au moins ou tu t’es réfugié derrière ton mental de lâche pour abandonner ?

Honnêtement plus d’une fois j’ai pensé à m’asseoir tranquillou au bord d’un ruisseau pour regarder le paysage et chercher des cèpes mais manque de peau c’est pas la saison… j’ai continué mon chemin. J’ai “couru” les 12 km les plus longs de ma vie, presque 2h pour faire la distance entre le refuge Marcadeau au km 20 (1855m) et le refuge des Oulettes au km 32 (2151m) avec un passage à 2600m… un vrai calvaire. Surtout que j’ai bien dû passer 1h30 en solo dans la montagne à suivre la trace avant de rejoindre d’autres concurrents et surtout me faire rejoindre. C’est très long 1h30 tout seul perdu avec les vaches et les brebis….

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Donc je n’ai pas abandonné non, même si ce n’est pas passé bien loin, avec un bras en moins.

Le bras en moins, t’es encore tombé comme une bouze ?

Oula oui la plus belle des bouzes ! Au dernier refuge je pointe non sans mal à la 100 -ème position. A cause du mauvais temps, on nous informe que le dernier col sera fermé et le parcours raccourci de 5 bornes. Il reste donc 14 km de descente jusqu’à la ligne d’arrivée. Probablement la plus belle des nouvelles de la journée. Je me dis à ce moment-là qu’il ne faut pas traîner au ravito et que je me bouge le cul pour finir dignement ce trail dans les 100 premiers.

Je prends trois morceaux de fromage au ravito et repart le plus “vite possible”, le terme est relatif.

Pour une fois la descente se passe bien, mais vient LE moment où je m’éclate de la plus belle des manière. Mon pied tape la cime d’une roche et tel un nain canonisé au cirque, je me retrouve catapulté dans le prolongement de la descente pour finir en beauté, le coude encastré dans un rocher en contre bas.

“J’ai beau être matinal, j’ai mal”. Heureusement, deux randonneurs espagnols ont eu la bonne idée d’assister à ce moment de grâce. Par chance, lui était médecin, elle infirmière. Ils m’ont donc rafistolé pour le mieux avec mon coupe-vent en guise d’écharpe pour mon bras.

A ce moment-là j’hésite encore à abandonner, ca doit bien faire 15 mins que je suis assis; c’est plutôt pas mal. Et puis merde, il reste 10km, je les termine au ralenti s’il faut mais je fais ça comme il se doit.

Je te passe donc le détail de ces 10 derniers kilomètres au rythme de sénateur où je me suis demandé ce que je foutais là, je pensais aux gens qui étaient tranquilles chez eux à regarder l’étape du tour…

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(Bonus, trouver la légende en commentaire)

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Mais tu l’as fini oui ou non ?

OUI, position 161, on s’en branle, passé la ligne d’arrivée, je file à la Croix Rouge, le mec me dit que mon coude est surement cassé… direction le centre radiologique et devine quoi ? Je n’ai rien…à part un gros hématome… tout ça pour ça.

Au moins j’ai bien gagné le droit de me foutre les jambes dans la fontaine du village à boire des bières pour regarder les autres arriver. Finalement j’aurais dû faire ça dès le départ.

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Crédit Photo @MathieuPinaud

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